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Neurodiversité et troubles cognitifs : handicap ou talent ?

Introduction – Et si notre système “handicapait” la neurodiversité ?

En France, le mot « trouble cognitif » évoque immédiatement le handicap.
Un dossier MDPH, une reconnaissance RQTH, des aménagements scolaires.
Dans les pays anglo-saxons, on parle davantage de neurodiversité : une différence de fonctionnement cérébral à comprendre et à valoriser plutôt qu’à corriger.

Deux visions coexistent.
L’une cherche à compenser, l’autre à révéler.
Mais une question dérange : notre système ne “handicape”-t-il pas lui-même les cerveaux atypiques en cherchant à les normaliser ?

Cet article propose un regard croisé entre le modèle français et l’approche anglo-saxonne, afin de repenser la place de la neurodiversité et des troubles cognitifs dans la société, la formation et le monde du travail.

Comprendre la neurodiversité et les troubles cognitifs

La neurodiversité désigne la diversité naturelle des fonctionnements du cerveau humain. Elle inclut l’ensemble des troubles cognitifs ou profils neuro-atypiques : TDAH, troubles DYS, autisme, haut potentiel, ou combinaisons de ces profils.

Ces différences ne sont pas des maladies, mais des variations neurologiques. Elles influencent la perception, la mémoire, la concentration, le langage, la planification ou la communication. Elles peuvent générer des difficultés dans un environnement standardisé, mais aussi des formes singulières d’intelligence, de créativité ou d’adaptation.

Le concept de neurodiversité et de troubles cognitifs invite à déplacer le regard : au lieu de chercher à corriger, il s’agit d’adapter les contextes d’apprentissage et de travail pour permettre à chacun d’exprimer ses compétences.

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Les troubles DYS, miroir de la neurodiversité et des troubles cognitifs en France

Un phénomène massif et encore mal compris

Les troubles DYS (dyslexie, dysorthographie, dyspraxie, dyscalculie, dysgraphie, dysphasie) concernent environ 6 à 8 % de la population française, soit plus de trois millions de personnes. Ils représentent la majorité des situations liées à la neurodiversité et aux troubles cognitifs.

Ces troubles ne traduisent pas un déficit intellectuel, mais un mode particulier de traitement de l’information. Les personnes concernées développent souvent des compétences visuelles, spatiales, analytiques ou créatives remarquables, mais qui restent peu reconnues dans un système fondé sur la norme linguistique et la vitesse d’exécution.

En France : le handicap scolaire avant tout

Le système éducatif français repose sur le triptyque lire-écrire-compter. Or, c’est précisément dans ces domaines que les élèves DYS rencontrent leurs plus grandes difficultés. Dès le primaire, ils peuvent être étiquetés « en difficulté » malgré une intelligence intacte, parfois supérieure à la moyenne.

Les dispositifs d’aide existants (PAP, PPS, MDPH) permettent une reconnaissance et une compensation, mais reposent sur une logique de déficit à prouver. L’élève doit démontrer qu’il est « empêché » pour obtenir une aide. Cette logique renforce une culture du handicap plus que de la diversité.

Ailleurs : la valorisation de la neurodiversité et des troubles cognitifs

Dans le monde anglo-saxon, les troubles DYS relèvent de la learning difference plutôt que du « trouble ». Les écoles appliquent le Universal Design for Learning (UDL), qui propose plusieurs modes d’accès et de restitution du savoir : supports visuels, auditifs, kinesthésiques, outils numériques ou typographies adaptées.

Les travaux de l’Université de Cambridge (Dr Helen Taylor, 2022) montrent que les cerveaux dyslexiques présentent une aptitude particulière à la pensée divergente, à la résolution créative de problèmes et à la vision d’ensemble. Ces qualités sont aujourd’hui reconnues comme des atouts cognitifs dans les contextes d’innovation, de recherche ou de conception.

La neurodiversité et les troubles cognitifs : deux visions culturelles opposées

En France : un cadre protecteur mais normatif

Le modèle français repose sur une logique médicale et administrative du handicap. Il protège, accompagne et compense, mais peine à valoriser la neurodiversité et les troubles cognitifs.

Ses points forts :

  • Un cadre légal solide (MDPH, RQTH, PAP, PPS) ;
  • Des aides concrètes pour les élèves et salariés concernés ;
  • Une reconnaissance institutionnelle de la diversité cognitive.

Ses limites :

  • Une approche centrée sur la déficience plutôt que sur le potentiel ;
  • Une lourdeur administrative et une inégalité territoriale ;
  • Un manque de formation à la neurodiversité dans les écoles et entreprises.

En cherchant à compenser les différences, la France normalise au lieu d’inclure et risque d’étouffer une partie du potentiel de la neurodiversité.

Dans le monde anglo-saxon : inclusion et valorisation de la neurodiversité

Au Royaume-Uni, aux États-Unis ou au Canada, la neurodiversité et les troubles cognitifs sont perçus comme une source de richesse. Les grandes entreprises (Microsoft, SAP, EY, Dell) ont développé des programmes de Neurodiversity Hiring pour recruter des profils atypiques : autistes, dyslexiques, TDAH, etc.

Ces initiatives reposent sur une logique simple : adapter l’environnement au mode de fonctionnement de la personne, et non l’inverse. La diversité cognitive devient un levier d’innovation, de performance et de cohésion.

Ce modèle comporte cependant des risques : survalorisation médiatique, inégalités d’accès, effets de mode. Mais il a le mérite d’affirmer que la différence cognitive est une forme de diversité à part entière, comparable à la diversité culturelle ou de genre.

Neurodiversité et troubles cognitifs : handicap ou talent ?

Opposer les deux serait une impasse. La neurodiversité et les troubles cognitifs ne relèvent ni exclusivement du handicap ni exclusivement du talent. Ils exigent une approche équilibrée : reconnaître les difficultés sans nier les forces, accompagner sans stigmatiser, valoriser sans idéaliser.

La véritable inclusion ne consiste pas à rendre les personnes conformes à un modèle unique, mais à transformer l’environnement pour accueillir toutes les formes de pensée.

Comment faire progresser la France vers une culture de la neurodiversité et des troubles cognitifs

  1. Repenser la MDPH : intégrer les forces cognitives dans les évaluations, pas seulement les déficits.
  2. Former enseignants et managers : sensibiliser les professionnels à la diversité cognitive.
  3. Valoriser les réussites atypiques : donner de la visibilité aux parcours neuro-atypiques.
  4. Appliquer le principe du Universal Design for Learning (UDL) : diversifier les supports et méthodes d’évaluation.
  5. Créer des établissements et entreprises pilotes : expérimenter des environnements inclusifs centrés sur la neurodiversité.
  6. Associer les personnes concernées : impliquer associations et experts dans les politiques publiques.
  7. Changer le vocabulaire : remplacer la logique du « trouble » par celle de la différence cognitive.

 

Conclusion – De la compensation à la valorisation de la neurodiversité et des troubles cognitifs

La neurodiversité et les troubles cognitifs ne sont pas des anomalies à corriger, mais des formes d’intelligence à comprendre. En continuant à les traiter uniquement sous l’angle du handicap, la France se prive d’un potentiel considérable d’innovation et de créativité.

La vraie inclusion ne consiste pas à intégrer ceux qui diffèrent, mais à reconnaître que la différence fait partie de la norme. Transformer nos institutions, nos pratiques pédagogiques et nos entreprises pour accueillir la pluralité des cerveaux, c’est investir dans une société plus agile, plus humaine et plus intelligente collectivement.

À l’ISEK, nous portons cette conviction : accompagner la neurodiversité et les troubles cognitifs, non pour les compenser, mais pour les révéler.

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Diplômé de Sciences Po et du Conservatoire National des Arts et Métiers, Laurent est un passionné de Qualité et de Formation. Il est persuadé, comme Dostoïevski, que l'Art sauvera le Monde.